Action de l’arsénite de sodium au vignoble

Résultat de recherche

Action de l’arsénite de sodium au vignoble

L’arsénite de sodium a été le seul moyen de lutte efficace contre les maladies du bois mais sa toxicité pour l’homme et l’environnement a contraint les pouvoirs publics à le retirer du marché en novembre 2001. En 2013, un projet de recherche coordonné par Florence Fontaine de l’Université de Reims Champagne-Ardenne se penche sur le mode d’action de ce produit. Les connaissances acquises ouvrent de nouvelles pistes. 

Au moment du retrait de l’Arsénite de sodium, peu d’études avaient été faites pour comprendre son mode d’action sur la plante et empêcher l’expression des symptômes. Les derniers travaux, à la fin des années 90, ont montré l’effet toxique sur la croissance des champignons, sur la germination de leurs spores et sur la diminution de la présence de certains d’entre eux dans les nécroses. Mais les techniques de recherche, les connaissances ne permettaient pas d’aller plus loin. Fin des années 2000, l’amélioration des connaissances sur les maladies du bois (sources d’inoculum, écologie microbienne,…), le décryptage du génome de la vigne et l’évolution des techniques de recherche (notamment en génomique) donnent la possibilité de se pencher sur la compréhension du mode d’action de l’arsénite.

Comprendre pour proposer de nouveaux moyens de lutte efficace

Les travaux sur l’étude du mécanisme d’action de l’arsénite ont été réalisés dans le cadre d’un projet de recherche CASDAR (2013- 2016) financé par le Ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, et le CNIV (Comité National des Interprofessions Viticoles – dont InterLoire). Les objectifs ont été de comprendre comment l’arsénite se distribuait et s’accumulait dans la plante, quel impact il avait sur la physiologie de la vigne et sur les champignons pathogènes et enfin de savoir s’il avait un effet sur la microflore accompagnatrice…. Ceci afin de trouver un ensemble de moyens voire un produit de substitution simulant l’action de l’arsénite. Les expérimentations au vignoble ont été faites sur chardonnay, merlot, gewurtztraminer en 2014 et 2015. Des ceps manifestant des symptômes foliaires l’année précédente ont été traités ou non à l’arsénite avant débourrement de telle sorte qu’aucun organe herbacé a été en contact avec le produit. Les ceps entiers ont été prélevés avant floraison et avant vendange. Des ceps n’exprimant pas de symptômes foliaires et n’ayant pas été traités à l’arsénite mais portant la majorité des champignons impliqués dans les maladies du bois ont été également prélevés pour servir de témoin. La microflore de ces ceps a été étudiée et l’arsénite quantifié dans les organes et le sol.

La quantité d’arsénite diminue au cours de la campagne

Après traitement, les chercheurs ont observé une accumulation de l’arsénite dans les nécroses et notamment dans l’amadou. En revanche, une faible accumulation est constatée dans les racines (rejet dans le sol probable). Sur les ceps traités, les champignons colonisent très peu les rameaux et la population de Botryosphaeriaceae est fortement diminuée dans les coursons. Autre constat, l’arsénite est rejeté par la plante au moment des pleurs et sa quantité diminue au cours du temps. Au niveau de la microflore des ceps traités, les chercheurs ont noté une diminution des populations de champignons associés à l’Esca, BDA et une augmentation des populations de certains agents bénéfiques (Penicillium, Trichoderma,…) par rapport aux ceps non traités. Il est aussi constaté une modification dans l’équilibre des populations de champignons : les ceps traités présentent une plus grande diversité des champignons.

L’arsénite induit des réponses différentes selon les organes

Au niveau de la plante, l’arsénite provoque des perturbations physiologiques : la photosynthèse des plants traités est diminuée impactant ainsi le cycle de la plante jusqu’à 4 mois après traitement puis la plante récupère gommant cet impact négatif. Parallèlement, l’arsénite induit d’autres réponses de la plante à ces modifications qui s’avèrent différentes selon les cépages et les organes. Sur l’ensemble des organes étudiés, les tiges herbacées pourraient, dans ce cadre, servir d’outil de diagnostic car elles reflètent bien ce qui se passe dans la plante. Il n’y aurait donc plus besoin de l’arracher complètement ! Au regard de ces travaux, il semble donc qu’il y ait des gènes de guérison et que ces derniers soient différents de ceux associés aux maladies du bois. Il semble également exister des gènes de défense induite puisque lorsque la plante malade est traitée à l’arsénite, elle n’est plus dans un état de stress et s’exprime comme la plante témoin asymptomatique. Peut-être serait-il alors possible à l’avenir d’établir un état « seuil de la maladie »? Ces premières conclusions seront affinées par l’analyse plus fine des jeux de données récoltées lors de ces expérimentations.

 

Article rédigé par C. Mandroux-InterLoire

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